Thèmes

presse prix sur vie france saint monde coup presse gain enfants article maison travail histoire centre internet sourire soi

Rubriques

>> Toutes les rubriques <<
· CULTURE (67)
· L'ACTUALITE (65)
· JARDIN (80)
· LA LECTURE (114)
· HUMEUR,HUMOUR ! (47)
· LES SCIENCES (85)
· RELIGION (65)
· HISTOIRE DE LA FAMILLE (47)
· PRIER (70)
· POESIE (62)

Rechercher
Derniers commentaires Articles les plus lus

· MILLARDAIRES
· SAINT JOSEPH ,PERE.PAR LE PAPE.
· lES EMIRATS ARABE UNIS
· FORUM DE DAVOS
· LA VAGUE VERTE

· LA TURQUIE
· ALLOCATIONS FAMILIALES
· ELECTIONS AMERICAINES
· ELECTIONS
· AVEC MACRON ?
· LES PARASITES
· MARITAIN
· 1200MILLARDS DE DOLLAR SUR LES INFRASTRUCTURES
· LAFILIERE
· LE CORAIL

Voir plus 

Abonnement au blog
Recevez les actualités de mon blog gratuitement :

Je comprends qu’en m’abonnant, je choisis explicitement de recevoir la newsletter du blog "papilacabane" et que je peux facilement et à tout moment me désinscrire.


Statistiques

Date de création : 30.11.2013
Dernière mise à jour : 21.09.2025
11812 articles


APPRENDRELE FRANCAIS

Publié le 20/06/2025 à 15:33 par papilacabane Tags : prix sur vie france saint monde coup presse gain enfants article maison travail histoire centre internet sourire

Dans la campagne bretonne, ils aident de jeunes migrants à apprendre le français

Reportage

Article réservé à nos abonnés. Marie-Jo, bénévole pour les Utopistes en action, enseigne dans le Finistère le français à de jeunes migrants non reconnus mineurs.

Marie-Jo, bénévole pour les Utopistes en action, enseigne dans le Finistère le français à de jeunes migrants non reconnus mineurs. Florence Joubert / pour La Croix

Alors que plusieurs mobilisations contre l’installation de migrants en province ont été très médiatisées, l’accueil continue sans heurt dans de nombreux territoires. À l’occasion de la Journée mondiale des réfugiés ce vendredi 20 juin, reportage en Bretagne avec l’association Les Utopistes en action qui, depuis 2018, scolarise et héberge des jeunes exilés dans les monts d’Arrée.

Aujourd’hui, on travaille le son « ou ». « Ouuu », fait Marie-Jo, la professeure de français du jour, en arrondissant les lèvres. « Ouuu », répètent Mahamadou, Adama et Aly, en avançant le menton pour accompagner l’effort. Invités à trouver des mots avec la syllabe étudiée, les trois adolescents proposent, dans une sorte de ping-pong au ralenti : « Chou », « joue », « boules », « fourmi », « route », « souris », « soucoupe ». « C’est bien, vous avez beaucoup progressé en peu de temps ! », encourage Marie-Jo. Cette ancienne assistante de direction de 77 ans est devenue, depuis deux ans et demi, professeure de français bénévole.

« Qui veut écrire “Ouvre la porte” au tableau ? Tiens, prends le marqueur »,lance-t-elle, œil clair pétillant et sourire amusé, à Mahamadou, 15 ans. En lettres capitales, un peu hésitantes, le jeune garçon écrit avec application « ouvour la port ». Doucement, Marie-Jo, lui fait prendre conscience des sons erronés, et bientôt, c’est un « ouvre la porte »sans faute qui apparaît sur le tableau blanc.

Depuis deux semaines seulement, Mahamadou fréquente l’École alternative des monts d’Arrée, créée en 2018 par l’association Les Utopistes en action et installée dans un ancien Ehpad mis à disposition par la mairie de Pleyber-Christ (Finistère), petite commune de 3 100 habitants, à 10 km de Morlaix.

Une école alternative pour des migrants non reconnus mineurs

Fuyant de grosses difficultés familiales, il a quitté la Guinée en 2024, traversant le Sénégal, la Mauritanie, le Maroc puis l’Espagne avant d’arriver à Nantes en février 2025, où le département de Loire-Atlantique, chargé d’évaluer son âge, ne l’a pas reconnu comme mineur. Il a fait un recours devant le juge des enfants mais, en attendant, explique-t-il, « j’étais dans la rue jusqu’à ce qu’une association m’envoie ici ».

À l’École des monts d’Arrée, il suit des cours de français, maths, histoire-géo, sciences de la vie ou encore informatique. Du lundi au vendredi, de 10 à 16 heures, y compris la moitié des vacances. Cet été, l’École alternative fait cours jusqu’au 25 juillet.

Une maison pour accueillir 15 adolescents

Le soir, après l’école, Mahamadou rejoint une colocation d’une petite quinzaine d’adolescents, presque tous dans la même situation que lui, dans une maison entourée de verdure à quelques kilomètres de là, dans le village du Cloître-Saint-Thégonnec, 650 habitants. Pour avoir le droit d’y habiter, chaque jeune signe une charte où il s’engage à respecter les lieux et ses habitants, ainsi qu’à participer aux tâches communes.

Loïc, l’un des cofondateurs de l’association, cuisine pour offrir gratuitement ces repas aux jeunes.

Loïc, l’un des cofondateurs de l’association, cuisine pour offrir gratuitement ces repas aux jeunes.Florence Joubert / pour La Croix

Ce soir, comme indiqué sur le frigo, c’est Mamadi qui est de corvée de cuisine. Il demande un coup de main à Mahamadou, qui accepte de le seconder. En attendant, Aly avec un « y » et un autre Ali, avec un « i » cette fois, curieusement vêtu d’une tenue de foot scintillante et d’un bonnet en laine, poussent le ballon devant la maison. Du moins jusqu’à ce que Sandrine, que les jeunes appellent « Tata », le réquisitionne pour aller ramasser les œufs au poulailler.

« Des élèves qui ont une grosse soif d’apprendre »

Longue chevelure grisonnante et lunettes rouges, Sandrine Corre, 52 ans, la cofondatrice des Utopistes en action, s’est cassé le pied en février. Ça ne l’empêche pas de faire visiter la maison à une vitesse déraisonnable sur ses béquilles. Au rez-de-chaussée, voilà la cuisine-salle à manger, qui « mériterait d’être mieux entretenue ».

Il arrive que, mécontente de l’état de l’appartement, Sandrine confisque la box Internet. Effet immédiat. Ici, l’unique douche, qu’on s’apprête à doubler grâce à des dons et à l’implication d’anciens jeunes de la maison – régularisés depuis et devenus plombier, carreleur, électricien, plaquiste… Aux étages, les chambres, où s’entassent les lits superposés.

Grâce aux bénévoles, les jeunes peuvent apprendre le français et s’insérer plus facilement à leur sortie de l’établissement.

Grâce aux bénévoles, les jeunes peuvent apprendre le français et s’insérer plus facilement à leur sortie de l’établissement. Florence Joubert / pour La Croix

Ici Sandrine apostrophe un garçon roulé en boule dans son lit : pourquoi est-il couché à cette heure-là ? Dehors, l’atelier bois, où chaque semaine grâce à deux bénévoles les jeunes sont formés à réaliser des meubles en palettes. Le week-end, explique Sandrine, il arrive aussi que des jeunes aillent faire du bénévolat aux Chiffonniers de la joie, association de Morlaix qui récupère et revend des objets d’occasion.

Cinquante bénévoles et des familles d’accueil

Tout ce petit monde tient grâce à un écosystème d’une cinquantaine de personnes très impliquées. Des professeurs, comme Marie-Jo. Ou comme Véronique, retraitée de 66 ans, qui après une carrière de prof dans l’éducation spécialisée, « éprouve beaucoup de plaisir à enseigner le français et les maths à des élèves qui ont une grosse soif d’apprendre ». Ou encore comme Fabienne, qui en plus de donner des cours et de visiter les jeunes à la maison tous les jeudis soir, héberge, en garde alternée avec une autre famille Ben, 16 ans, qu’elle va aussi emmener en vacances en Alsace cet été.

Josette, 68 ans, ancienne aide-soignante, n’héberge pas et n’enseigne plus mais, depuis un an, elle s’occupe du vestiaire de l’École alternative, une activité pour laquelle elle a motivé Nicole, 72 ans, sa copine depuis un demi-siècle. Ensemble, elles trient les dons de vêtements, les étiquettent et les distribuent aux jeunes qui en ont besoin.

Et c’est sans compter sur ceux qui font les chauffeurs entre la maison, l’école, les rendez-vous médicaux… Sans compter non plus sur l’indispensable Loïc, le cuistot de la bande qui trouve, grâce aux Restos du cœur et au Secours populaire, de quoi faire des repas pour un coût de revient imbattable de 1,50 €, offerts aux élèves et aux bénévoles de l’école le midi.

« On a zéro incident ni plainte à déplorer »

Le tout fonctionne sans heurt. Dans une Bretagne elle aussi désormais perméable au vote RN, où l’extrême droite a réussi à faire échouer début 2023 le projet d’accueil de migrants dans le petit village de Callac (Côtes-d’Armor), à une quarantaine de kilomètres de là, « sans doute il y a des gens qui ne sont pas d’accord avec ce qu’on fait mais je croise les doigts car pour l’instant on n’a jamais eu de problème », estime Sandrine. « On a zéro incident ni plainte à déplorer »,confirme Julien Kerguillec, le maire de Pleyber-Christ, qui loue à prix modique aux Utopistes le bâtiment qui accueille l’école.

C’est en 2019 qu’une retraitée du coin propose de louer une maison au Cloître-Saint-Thégonnec, au prix que voudra l’association. 

C’est en 2019 qu’une retraitée du coin propose de louer une maison au Cloître-Saint-Thégonnec, au prix que voudra l’association.  Florence Joubert / pour La Croix

Pourtant le maire est réticent à l’idée d’un article de presse sur le sujet. « Il y a quelques années, on s’était positionné pour ouvrir un centre pour migrants et la fachosphère a tenté de lancer des rumeurs. Ça n’est pas allé plus loin mais, avec tout ce qui se passe aujourd’hui, on n’a pas envie de leur donner des idées. Encore que je ne sais pas ce qu’on pourrait reprocher à cette association. Avec peu de moyens, ils remettent sur les rails des gamins qui ont eu des parcours de vie terribles. Leurs résultats sont remarquables. »

« Avec peu de moyens, ils remettent sur les rails des gamins qui ont eu des parcours de vie terribles. Leurs résultats sont remarquables. »
Julien Kerguillec, maire de Pleyber-Christ

Il faut dire que le projet a désormais quelques années de route. Tout a commencé en 2015 quand Sandrine et son « pote depuis trente ans » Loïc entreprennent de récupérer des vêtements pour les exilés de Calais et de Paris. Mais en 2017, quand l’État installe une soixantaine de migrants dans un hôtel désaffecté de la région, le projet prend une autre tournure. « On est allé les voir ces gens et on leur a demandé ce qu’on pouvait faire pour eux, et ils nous ont dit que ce qu’ils voulaient c’était aller à l’école pour apprendre le français », raconte Sandrine.

Aider les exilés dans leur demande d’asile

Qu’à cela ne tienne. Au printemps 2018, l’École alternative des monts d’Arrée démarre avec une quinzaine de jeunes et les premiers professeurs bénévoles, d’abord au Cloître-Saint-Thégonnec, puis à Pleyber-Christ. Si les élèves sont d’abord hébergés par les bénévoles, dès 2019 une retraitée du coin propose de louer une maison au Cloître-Saint-Thégonnec, au prix que voudra l’association. Ce sera 300 € par mois. L’association organise plusieurs éditions d’un Festival des utopies, dont les bénéfices servent à financer ses charges. Jusqu’à ce qu’elle obtienne des financements de fondations ou des subventions, la communauté de communes versant par exemple 10 000 € par an.

Il faut dire que l’association monte en gamme. Car il ne suffit pas de scolariser et d’héberger les jeunes, qui au départ sont plutôt de jeunes majeurs. Il faut aussi se préoccuper de la situation administrative de ces exilés qui veulent obtenir l’asile. « On n’y connaissait rien, on a pris conseil mais il a fallu s’y mettre »,raconte Sandrine, qui, comme d’autres, héberge alors plusieurs des jeunes pris en charge. Dont Ben, un jeune Ivoirien de 18 ans, avec qui elle, son mari et ses enfants se lient profondément.

En l’aidant à écrire son récit de vie à destination de l’Ofpra, l’office qui instruit la demande d’asile, « j’ai pris conscience de son parcours traumatique : les raisons de son départ, la traversée du désert, la torture en Libye, la Méditerranée, l’exploitation sur tout le chemin… tout ça m’a sauté à la gueule »,réalise-t-elle.

Des arrivants de plus en plus jeunes

L’ensemble de la première promotion accueillie obtiendra l’asile et pourra voler de ses propres ailes. Mais très vite d’autres arrivent, de plus en plus jeunes, et eux demandent à être reconnus comme mineurs par les départements. Il faut donc désormais se former aux recours contre le refus de minorité. « On a de la chance, pour l’instant, quasiment 100 % de nos jeunes dont la minorité n’avait pas été reconnue par le département ont eu gain de cause devant le juge des enfants,affirme Sandrine. Mais c’est du boulot car il faut présenter des dossiers solides. »

Sandrine Corre, fondatrice de l'école alternative des Monts d'Arrée. Les bénévoles accompagnent ces exilés dans leurs procédures administratives pour être reconnus comme mineurs ou pour demander l’asile.

Sandrine Corre, fondatrice de l'école alternative des Monts d'Arrée. Les bénévoles accompagnent ces exilés dans leurs procédures administratives pour être reconnus comme mineurs ou pour demander l’asile. Florence Joubert / pour La Croix

Quand leur minorité est reconnue, les jeunes de l’École alternative sont alors pris en charge par le département et scolarisés dans le circuit classique. Mais il arrive qu’à 18 ans leur première demande de titre de séjour se heurte à un refus de la préfecture. Le combat recommence alors.

« Je me souviens du petit Alassane qui est arrivé à 16 ans, très angoissé,raconte Sandrine. Il n’a pas été reconnu mineur mais on a réussi à le faire scolariser en classe de troisième. En un an, il a rattrapé le niveau et a fait un bac pro microtechnique. À sa majorité, la préfecture a refusé la régularisation. Mais heureusement, le tribunal administratif a su considérer ses preuves d’insertion et lui a accordé un titre de séjour. Aujourd’hui, le gamin a un travail, et une copine. »

Un modèle économique à trouver

L’École, qui a vu passer près de 200 jeunes depuis 2018, ne compte plus les exemples d’anciens accompagnés et désormais insérés dans la région. Mais tout ça est épuisant. En 2022, Sandrine et Loïc, les deux cofondateurs, sont au bout de leurs ressources, mentales mais aussi financières. C’est alors que se produit une sorte de miracle, décrit Sandrine avec amusement.

« On avait aidé un jeune de Briançon qui avait de gros problèmes de santé et suite à ça, un couple s’est présenté et nous a posé plein de questions sur l’association, avant de nous demander de quoi nous aurions le plus besoin pour pérenniser notre activité. On lui a dit qu’il faudrait qu’on puisse se salarier. Le couple nous a alors dit qu’ils disposaient de 250 000 €, de quoi financer deux salaires pendant cinq ans. Je crois que j’en ai pleuré ! »

Ce mécénat garantit la survie de l’association jusqu’en 2028. Mais déjà, Sandrine pense à la suite : « Si on veut durer, il nous faut un modèle économique. Je réfléchis à monter une recyclerie végétale où on remettrait en état des plantes qu’on pourrait ensuite vendre. Ça pourrait être pas mal ! »

repères

Le 20 juin, la Journée mondiale des réfugiés

La Journée mondiale des réfugiés est célébrée chaque année le 20 juin.Désignée à l’initiative des Nations unies, elle permet d’attirer l’attention sur le sort des personnes qui ont dû fuir leur pays. De nombreuses activités sont alors organisées pour offrir des occasions de soutenir les exilés.

Elle a été célébrée le 20 juin 2001 pour la première fois au niveau mondial afin de commémorer le 50e anniversaire de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés.