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Dernière mise à jour : 11.12.2025
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MORTDUSTEARMERJEAN PORMANOVE

Publié le 31/08/2025 à 08:56 par papilacabane Tags : sur soi homme gain mort nuit cadre

Mort du streameur Jean Pormanove : « Se focaliser sur son consentement occulte l’essentiel »

Tribune

Michel Terestchenko

Philosophe, auteur de Un si fragile vernis d’humanité, banalité du mal, banalité du bien (2007) et Les scrupules de Machiavel (2020)

Le streamer français Jean Pormanove, dit « JP », de son vrai nom Raphaël Graven, est décédé à l’âge de 46 ans.

Le streamer français Jean Pormanove, dit « JP », de son vrai nom Raphaël Graven, est décédé à l’âge de 46 ans. Olivier Corsan / LE PARISIEN/MAXPPP

Alors que la plateforme Kick a annoncé, mercredi 27 août, son intention de coopérer avec les autorités françaises, après la mort en direct du streameur Jean Pormanove, Michel Terestchenko souligne que le respect de la dignité humaine prévaut sur le consentement.

Un homme, Raphaël Graven, dit Jean Pormanove, est mort dans la nuit du 18 août après avoir subi, pendant plus de 290 heures, coups, sévices et humiliations, diffusés en ligne sur la plateforme Kick, qui comptait plus de 160 000 abonnés. Les séances, auxquelles assistaient en direct jusqu’à 15 000 personnes, duraient depuis des mois, et, dénoncées par Mediapart en décembre 2024, avaient déjà alerté la justice.

Une enquête judiciaire a été ouverte pour établir les circonstances exactes du décès et l’on s’interroge sur les appétits sombres qui poussaient tant de personnes – en général des hommes de 20 à 40 ans – à inciter, par des dons monétaires, les insultes humiliantes et les coups violents, dans une mise en scène sordide orchestrée par les acteurs eux-mêmes, motivés par l’appât du gain – entre 25 000 € et 30 000 € par mois.

Reste à évaluer la part du consentement de Jean Pormanove, qui participait activement avec ses partenaires, connus sous les pseudos de « Safine » et « Naruto ». Parmi eux figurait aussi un handicapé sous curatelle, surnommé Coudoux. La responsabilité de la plateforme Kick est également mise en cause. Dans certaines vidéos, Jean Pormanove affirme accepter les sévices. Dans d’autres, il demande en vain d’appeler la police ou l’hôpital. Tout porte à croire qu’il a persisté pour des raisons financières. Mais se focaliser sur son consentement occulte l’essentiel : l’atteinte à la dignité humaine, à laquelle nul n’aurait dû céder, ni les tortionnaires, ni les spectateurs, ni lui-même.

Protéger la dignité humaine

Une affaire ancienne l’illustre. Au mois de novembre 1991, le maire de Morsang-sur-Orge avait interdit un spectacle dans lequel « le nain volant, Mister Skyman », 1,14 m, était propulsé, au plus grand amusement du public, sur un matelas gonflable. L’organisateur de l’attraction et son principal acteur, désormais privé d’emploi et de revenu, portèrent l’affaire devant le tribunal administratif de Versailles, qui annula l’arrêté municipal. Le Conseil d’État, saisi en dernière instance, confirma, dans un arrêt célèbre de novembre 1995, l’interdiction de la municipalité au motif que cette attraction portait atteinte à la dignité humaine.

Désormais élevée au rang de principe d’ordre public, la protection de la dignité humaine autorisait, au même titre que le bon ordre, la sécurité, la salubrité et la tranquillité publique, d’imposer des restrictions à certaines libertés individuelles. Le principe constitutionnel de protection de la dignité humaine se trouvait ainsi placé au-dessus de celui du consentement, et il fixait un cadre inviolable et structurant au sein duquel les relations et activités librement acceptées peuvent s’exercer.

La plus haute juridiction administrative avait reconnu que, en dépit du fait que des intérêts individuels avaient été lésés et des libertés restreintes, un principe supérieur prévalait. Un principe fondamental et intangible, à la fois moral et juridique, qui protège nos sociétés des dérives et abus auxquels conduit l’idée que la liberté, identifiée au consentement, est sans limites.

L’humanité, un vernis fragile

Nombre d’affaires récentes ont montré que le consentement pouvait s’exercer dans des situations d’emprise et de vulnérabilité, et il conduit parfois les individus à commettre des actions qu’ils ne commettraient pas en d’autres circonstances. Au reste, en droit pénal, en cas de violences ou de violences aggravées, le consentement ne constitue pas un fait justificatif.

On dira qu’encadrer l’exercice des libertés individuelles sur le fondement d’un principe flou est dangereux. Mais la dignité ne s’oppose pas à la liberté : elle la fonde et la garantit. Elle signifie qu’il existe en l’homme une part indisponible à laquelle nul, pas même l’individu, ne doit porter atteinte, sans que se dresse ou doive se dresser la force de l’interdit. Ainsi de la prohibition absolue de la torture, consacrée par le droit international. Se livrer volontairement à des sévices et humiliations revient à se dégrader soi-même et à bafouer la dignité humaine en sa personne.

Il est nécessaire que soient réglementés ces espaces où la liberté d’agir, pourvu qu’on soit consentant et qu’on y trouve son intérêt, ouvre la voie au « tout est permis » et, inévitablement, au pire. On oublie trop souvent que l’humanité est un vernis fragile.