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LA LAICITE

Publié le 27/08/2025 à 15:29 par papilacabane Tags : sur place sport société cadre enfant

« La laïcité ne saurait être réduite à un affichage ou à un réflexe disciplinaire »

Tribune

Raphaël Matta-Duvignau

Maitre de conférences en droit public à l’UVSQ Paris-Saclay

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Des mamans portant le voile amènent leur enfant pour la rentrée scolaire dans une école maternelle du quartier populaire de la Paillade à Montpellier le 4 septembre 2023. Guillaume Bonnefont / IP3 PRESS/MAXPPP

À l’approche de la rentrée scolaire, le président de l’Observatoire du droit à l’éducation, Raphaël Matta-Duvignau, plaide pour une vision équilibrée de la laïcité, qui ne soit ni crispation autoritaire, ni laxisme complaisant.

À l’aube d’une rentrée sous tension identitaire, rappelons que la laïcité n’est ni croisade ni nostalgie, mais un socle juridique. À l’heure des 120 ans de la loi de 1905, c’est le droit, non l’émotion, qui doit guider notre lecture d’une neutralité fragilisée. Chaque rentrée ravive les polémiques – voile, abaya, prières, menus, contestations d’enseignements – où le débat se crispe et le juridique s’efface derrière le tumulte.

Or, l’article 1er de la Constitution place la laïcité au cœur de notre pacte républicain. La loi de 1905 ne combat pas la religion, elle garantit à chacun la liberté de croire ou non, dans les limites de l’ordre public. Ce principe repose sur un équilibre délicat entre liberté de conscience, neutralité du service public et égalité des usagers, qu’il faut comprendre, expliquer et défendre.

L’école : un « sanctuaire »

Jean Zay invoquait l’école publique républicaine comme un « sanctuaire civique » : un espace neutre, non par indifférence, mais par exigence démocratique. L’article L.111-1 du code de l’éducation en fait un lieu de transmission des valeurs républicaines, dont la laïcité. Ce principe garantit la liberté de conscience des élèves et protège l’institution de toute emprise idéologique ou communautaire.

Mais sur le terrain, la laïcité devient floue : instrumentalisée, perçue comme outil d’exclusion ou étendard militant. Pourtant, la jurisprudence est claire : la liberté religieuse des élèves peut être limitée si elle perturbe le service public (CE, Kherouaa, 1992 ; Singh, 2007). La loi du 15 mars 2004, interdisant les signes religieux ostensibles, repose sur un triptyque fondamental : liberté de conscience, neutralité, égalité. Mais l’appréciation concrète des tenues (abayas, bandeaux, jupes longues) complique les décisions et alimente la judiciarisation. Face à ces tensions, les réponses institutionnelles restent souvent réactives et non structurantes.

L’université : un terrain mouvant

À l’université, le cadre est plus souple : les étudiants ne sont pas soumis à une obligation de neutralité. En revanche, les enseignants, en tant qu’agents publics, doivent respecter la neutralité politique et religieuse (L.121-1 code général de la fonction publique, CGFP) ; leur liberté académique (L.952-2 code de l’éducation) ne saurait être confondue avec un droit à l’imposition de leurs convictions. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH, Leyla Sahin, 2005) admet que la laïcité puisse justifier des restrictions dans l’enseignement supérieur, si elles sont nécessaires dans une société démocratique.

L’université, maillon faible, voit certains enseignements contestés par des revendications virulentes, dans un climat de relativisme culturel et d’autocensure, voire de complaisance, bien que l’article L. 141-6 du code de l’éducation précise que l’enseignement supérieur public est laïc et indépendant de toute emprise politique, religieuse ou idéologique.

La neutralité : une obligation asymétrique

La neutralité s’impose aux agents publics, pas aux usagers, sauf exception. Le Conseil d’État l’a rappelé dès 2000 (avis, Demoiselle Marteaux) : un agent ne peut porter de signes religieux visibles dans l’exercice de ses fonctions. Il ne s’agit pas d’une limitation de la liberté individuelle, mais d’une garantie d’impartialité et de confiance dans le service public. C’est d’ailleurs ce qu’a affirmé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 7 décembre 2023 (n° 2023-855 DC) : « La laïcité ne consiste pas à interdire les convictions, mais à empêcher qu’elles dictent la règle commune. »

Incarner ce principe suppose d’en donner les moyens aux personnels en première ligne – enseignants, CPE, chefs d’établissement – souvent démunis face à des dilemmes complexes, tiraillés entre respect du droit et pressions diverses. L’absence de doctrine claire et de formation solide et systématique rend l’application du principe hasardeuse. Le flou entre religieux, culturel, vestimentaire, libertés fondamentales et ordre public ouvre la voie à l’hésitation, voire l’arbitraire.

Entre crispation autoritaire et laxisme complaisant

Deux dérives guettent aujourd’hui la laïcité scolaire : celle d’un sécuritarisme identitaire, où la laïcité devient un outil de surveillance des corps, une exclusion fondée sur les apparences ; celle d’un relativisme aveugle, refusant de nommer les tensions, par peur de stigmatiser ou de froisser. D’un côté, certains réduisent la laïcité à une politique de contrôle des apparences, au point d’en faire (parfois sous le couvert du combat militant) un outil d’exclusion. De l’autre, un relativisme paresseux nie les tensions pourtant bien réelles entre certaines revendications religieuses et les principes scolaires ; refuser de nommer les difficultés sous prétexte d’apaisement revient à laisser s’installer des logiques séparatistes, contraires à l’esprit même de l’école publique. Ni l’une ni l’autre ne servent ni le projet républicain, ni le fondement de la laïcité : construire un espace commun.

La laïcité ne saurait être réduite à un affichage ou à un réflexe disciplinaire. Elle suppose une politique éducative cohérente, une formation juridique renforcée de tous les personnels, un soutien clair de l’institution et un dialogue renouvelé avec les usagers. Elle se joue jusque dans les cantines scolaires, où les menus de substitution illustrent les tensions entre respect des convictions religieuses et principe de neutralité. Le Conseil d’État (CE 2020, Commune de Chalon-sur-Saône) rappelle que les collectivités ne sont pas tenues de proposer des menus différenciés, mais ne peuvent fonder un refus systématique sur la religion. L’enjeu n’est pas alimentaire, il est juridique et républicain : éviter une discrimination indirecte tout en préservant un espace commun laïc.

La République n’a pas à s’excuser d’être laïque. L’École et l’Université doivent redevenir des lieux d’émancipation, non de renoncement. Comme le rappelait Jean Zay : « L’enseignement laïc est l’enseignement de la liberté. » À condition d’oser, encore, en défendre le sens.